Trésors de mercerie
Les boutons, surtout les boutons de chemise d’autrefois, toutes nos grands-mères en recelaient des collections dans leur boîte à ouvrage.
Trousse de couture, boîte à ouvrage…
Un de mes fils tout jeune un beau jour produisit son premier mot-valise en évoquant ma « boîte à courage ». C’était assez bien trouvé.
Un autre au même âge, désignant un des accessoires de ladite boîte, me demanda comment s’appelait ce long ruban strié que, déroulé, toute couturière digne de ce nom portait autour du cou (lui avait simplement dit « ce truc, là »), puis sur ma réponse il ouvrit des yeux ronds et rétorqua :
— Un mètre ? Mais… pour mettre où ?
Hilarité dans les foyers.
Ah, mes fils adorés… Si j’ai pu un temps les trouver fatigants, jamais-jamais avec eux je ne me suis ennuyée. Mais c’est une autre histoire, toute mon histoire en fait.
Ma grand-mère maternelle dans des boîtes de Bergamotes de Nancy conservait ses boutons. Sa propre mère, mon arrière-grand-mère Bonne-Maman Pic, le faisait elle-même d’autant plus facilement qu’elle habitait juste à côté de la fameuse place Stanislas Leszczynski. Maman garda cette habitude. Et moi, à mon tour j’ai perpétué la tradition. Ces boîtes jaune et rouge emportent avec elles l’odeur surannée des bonbons anciens, mélangée à celle, plus minérale, de la nacre. Et le bruit, oh oui, ce son si particulier : le doux babil des boutons brassés, doigts plongés au creux de la boîte ouverte, l’œil cherchant celui qui conviendrait.
Enfant, je jouais à les trier, tous ces boutons mélangés, les ranger par styles, formats et couleurs : du blanc à l’ivoire en passant par le beige rosé, les teintes différaient, tout comme celles des perles.
Puis vint un temps où j’en fis des colliers. Bien avant que cela ne soit à la mode du DIY, il me semble.
Je les portais, c’était original surtout l’été sur ma peau bronzée, et l’on me demandait :
— C’est du coquillage ?
Avec ferveur je répondais, comme on le dit des roses :
— Oh non, non… ce sont des boutons, des boutons de nacre.
[photos : Pinterest]