Je parle vraiment tout le temps ?

Je parle vraiment tout le temps ?

Nous étions allés rendre visite à l’une de mes plus jeunes sœurs, dans le Haut-Vaucluse au pied du mont Ventoux, et lors du séjour nous avions fait une balade magnifique — ah oui, alors ça, les paysages étaient vraiment-vraiment magnifiques, et je ne me privais pas de le dire !

Nous passions par de petits sentiers à la végétation touffue, étroits et escarpés. La vue était à couper le souffle : le regard portait loin, par chaque trouée dans les branchages, sur la vaste plaine qui s’étendait sous nos yeux. Et moi je m’exclamais, je m’enchantais, je m’émerveillais, tout en faisant bien attention à l’endroit où je posais les pieds sur le sol caillouteux et inégal.

Et ce d’autant plus que j’arborais des ballerines — de couleur, pour autant que je me le rappelle, c’est que j’aime les assortir à la teinte de mes tuniques. Et puis c’est pratique, les ballerines, elles me chaussent toute la belle saison, elles vont avec tout et permettent d’aller partout. Ça ne protège pas le pied ? Comment ça ? Mais si, mais si, ça me le tient très bien, et puis on n’a pas prévu de faire un running, non plus ? On se balade tranquillement, n’est-ce pas ?

Et nous continuions de marcher.

Les pierres, ou les cailloux… oui, les cailloux surtout… ça peut être dangereux. Surtout s’ils roulent. Oh et tiens d’ailleurs, ça me rappelle une anecdote avec les enfants. Nous passions des vacances en Espagne. Mon aîné préféré avait quatre ans. Il était en train d’escalader un petit muret de pierre sèches, devançant un jeune ami du même âge à qui il donnait, étape par étape, des conseils très avisés : « Cette pierre-là, tu peux poser ton pied dessus ; elle est morte. Mais pas celle-ci qui est encore vivante ; elle bouge ! » Lui était tout ce qu’il y a de sérieux, et nous, les parents, en entendant cela nous étions bien sûr en diguedille.

Et nous continuions de marcher.

Je riais encore au souvenir de cette histoire qui à l’époque m’avait ravie et que souvent, comme ce jour-là, je racontais toujours de bon coeur. À personne je n’épargnais mon doux babil. Quand on se balade, c’est aussi pour papoter, non ?

Et nous continuions de marcher.

Et voilà que je me suis trouvée toute fatiguée. Et moi, émoi, j’ai donc dit que c’était fatigant, quand même, de marcher comme ça.

Mon beau-frère a alors remarqué, pas fort et très calmement : « Bah oui, forcément, tu parles tout le temps, aussi. »

J’en ai été… euh… saisie. Oui, sidérée. À vrai dire je ne savais pas s’il rigolait ou s’il était sérieux. Alors, dans le doute, je me suis tue.

Et nous continuions de marcher.

Et… eh bien… eh bien, c’est tout à fait vrai qu’il est moins fatigant de marcher sans parler !
😂😅😂🤣

📷 ©LaureChevalierSommervogel

5 réflexions sur “Je parle vraiment tout le temps ?

  1. Bonjour Laure,

    Mes parents m’ont souvent reproché de trop parler de trop réfléchir et de poser trop de questions 😕 Alors qu’au contraire il faut laissez la curiosité d’un enfant se développer.

    Bises Xav

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  2. Chère Laure
    Mon expérience de la randonnée et de la course en pleine nature me fait considérer que c’est en fonction de l’adéquation ou non du rythme adopté pour la marche ou la course, que certaines personne pourront s’essouffler ou même s’épuiser silencieusement tandis que d’autres seront pleinement dans l’aisance en partant ou même en chantant car l’une et l’autre de ces deux émissions sonores ne sont finalement que des exercices respiratoires, certes plus ou moins intéressant ou mélodieux à écouter, mais pleinement compatibles avec la marche ou la course.
    Par ailleurs, un tant soit peu de bon sens suffit à réaliser que si une personne peut poursuivre sa marche ou sa course sur plusieurs kilomètres en parlant ou en chantant, c’est qu’elle n’est pas essoufflée, sans quoi, le malaise ne tarde pas à jouer la fin de la partie.
    Enfin, quelques connaissances anatomiques fondamentales font savoir que le groupe musculaire mobilisé pour la mise en vibration des cordes vocales, que ce soit pour parler ou pour chanter, est si économe énergétiquement qu’il serait abusif de lui attribuer la cause d’un épuisement à moins qu’il ne s’agisse d’un discours de campagne présidentielle ou d’un récital lyrique.
    En revanche, il arrive que certains auditeurs puissent, eux, ressentir une lassitude pouvant cumuler son effet à celui de la lutte contre la gravité que leurs corps et mental mènent depuis peut-être trop longtemps pour eux, mais je suis certain, chère Laure, qu’en l’occurrence, cette hypothèse est totalement hors de propos 🙂

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    • Merci pour ton retour, toujours circonstancié ! La justesse de tes observations m’enchante même si tes conclusions parfois me font beaucoup rire…
      J’ai un tempérament très extraverti qui peut provoquer « la lassitude des auditeurs », comme tu dis — mouhaha !! —, surtout ceux qui sont habitués à la réserve de leur entourage.
      Encore un exemple des différences de caractère que l’on peut constater au sein d’une fratrie : l’une est volubile quand l’autre est économe de ses mots…

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  3. Leur plus haute ambition étant de te remercier, par cette forme de révérence qu’il ne m’est pas trop malaisé d’accomplir, pour l’intérêt suscité et la bienfaisance prodiguée par tes écrits, tout particulièrement en ces temps anxiogènes, je suis enchanté que l’une ou l’un de mes observations, commentaires ou pirouettes philosophiques puisse avoir suscité l’épanouissement de l’un de tes sourires.

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