La certitude d’être aimé

La certitude d’être aimé

Quand je suis arrivée dans la famille de mon namoureux, j’ai constaté que ma belle-mère disait très souvent à son plus jeune fils – qui se trouve être le plus grand de sa fratrie (c’est lui, mon namoureux) :
— Tiens, toi qui es grand-fort-et-bête, peux-tu m’attraper ça sur l’étagère du haut ?
Et moi, émoi, j’en étais choquée, mais alors… vraiment suuuper choquée.
Un jour je lui en ai parlé, à mon namoureux, je lui ai dit que ça me paraissait tout de même une drôle de façon de s’adresser à son fils.
Il s’est tordu de rire et m’a répondu que c’était une expression toute faite, qu’il ne fallait pas la prendre au premier degré ni au pied de la lettre (ah ? tiens-tiens ?!?). Il m’a expliqué que, venant de sa maman, il savait bien que c’était affectueux, et même qu’il l’aimait bien – il parlait de l’expression, sa mère il l’aimait beaucoup, ça, je le savais déjà !

J’ai réalisé qu’il était absolument sûr de l’amour que ses parents lui portaient. Un amour inconditionnel.
Ça donne beaucoup d’assurance dans la vie, cette certitude-là. C’est bien plus qu’une conviction.
Heureux homme.

J’ai toujours relié cette anecdote à un autre épisode familial.
Ultérieur, celui-là.

Un matin pendant le petit-déj’, un de mes fils – cinq ans, six peut-être – renverse son bol.
Le lait chocolaté trempe tout sur son passage, macule son pydjouille, coule par terre… Bref, il y en a partout-partout-partout ! Comme on l’entend intelligemment dire parfois dans ces cas-là : il aurait voulu le faire exprès, il ne s’y serait pas pris autrement.
Je pousse de hauts cris et, avec mon impulsivité caractéristique, je m’exclame :
— Mais quel imbécile ! Ah bah, bravo, c’est réussi ! (ce qui, j’en conviens, n’est pas beaucoup plus approprié, mais voilà, c’est ça, la spontanéité…).
Je lui dis de filer dans la salle de bains retirer son pydj’. De mon côté je donne rapidement un coup d’éponge sur la table et le carrelage, puis je le rejoins pour l’aider à se débarbouiller.
Je me saisis de lui et l’assieds sur le plan des vasques, le chatouille et le gratouille, lui picore des bisoudoux dans le cou… bref, je rigole comme j’en ai l’habitude en le regardant avec tout l’amour que j’ai pour lui.
Et je les aime, mes fils, ah ça oui, je les aime !
Mais je vois que lui me présente un visage fermé et qu’il résiste à mes z’affectueuses z’effusions.
Alors je m’en étonne :
— Boh ? Qu’est-ce qui t’arrive, mon coeur ? Pourquoi tu fais cette tête-là ?
Et lui de me répondre, avec un air digne, mais diiiiiigne, rien que d’y repenser j’en ai encore le cœur tout chaviré :
— Tu m’as dit « imbécile ». Est-ce qu’on dit « imbécile » à son enfant chéri ?

Alors bien sûr je me suis confondue en excuses, je lui ai dit que je regrettais d’avoir dit ça, que je ne voulais pas lui faire de la peine – ah ça non, vraiment pas, pas du tout même – et qu’imbécile, je ne pensais absolument pas qu’il l’était… pas précisément, justement !
Je lui ai demandé pardon.
Et puis on s’est fait tout plein de câlins et il a recommencé à sourire.
Heureux enfant.

Et moi, émoi, je n’ai pas oublié ces circonstances.
J’ai trouvé que mon fils avait eu la meilleure attitude qu’il soit.
Il savait qu’il était mon enfant chéri – première raison d’avoir confiance en lui.
Et il était indigné que je l’aie traité d’imbécile – parce que lui-même avait la certitude de ne pas l’être.
J’ai aussi noté et admiré que, sans plus attendre et sans laisser la situation s’envenimer ni surtout l’entamer sur la durée, il ait su mettre les choses à plat, aussi simplement qu’un enfant de son âge pouvait le faire, un enfant ayant toute confiance dans la réaction que sa maman allait avoir.

Depuis j’ai poussé ma réflexion – et pas uniquement dans ses retranchements.

J’ai le souvenir, enfant, d’avoir été entourée de beaucoup, beaucoup d’amour.
Un amour très conditionnel, je pense. Et sans doute pas exprimé d’une façon qui me permette d’en être sûre et certaine. Mais c’est une autre histoire, toute mon histoire en fait.
Je me rappelle quelques situations et puis des remarques aussi, qui sont venues abîmer ma perception, ma conviction pour ne pas dire ma certitude, d’être aimée.
Des remarques pas délibérément méchantes, je l’ai compris aujourd’hui, disons plutôt particulièrement maladroites, souvent dictées par l’exaspération du moment. Mais des remarques pour lesquelles il n’y a pas eu de mise à plat réparatrice.
Alors, au fil des ans, elles ont pernicieusement pris de la place, devenant de plus en plus encombrantes.

C’est la raison pour laquelle retrouver et raconter les beaux souvenirs, ceux qui font du bien, permet d’inverser cette tendance : c’est ceux-là qui bientôt vont occuper le plus de place.
Et puis je vois que cela plaît… Alors vraiment, pourquoi m’en priver ?

📷 Pixabay

2 réflexions sur “La certitude d’être aimé

  1. Hello ,
    Ce qui est vraiment chouette c’est qu’il n’ a pas eu peur de dire ce qui l’a blessé, de parler c’est super de le constater, je crois que quoi qu’il se passe c’est la communication qui est le plus important tout le temps et sur tous les sujets, parfois laisser des pointillés… pour qu’ils y reviennent et pas un point final. C’est bien aussi un petit rdv canapé ou rdv tapis tous les 15 jours 3 semaines pour vider nos poubelles ! (aborder les sujets qui fâchent ou qui enthousiasment) Nous on s’amusait faites entrer l’accusé, la parole est à la défense, ….ha ha nan mais c’est Louis qui…. et la présomption d’innocence oups oups…il y avait même le bâton de parole. qui terminait en chanson parfois ha ha ha !
    Bien à vous 🙂

    Aimé par 1 personne

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