Décrocher le téléphone pour être tranquille

Décrocher le téléphone pour être tranquille

Je me souviens parfaitement de ces téléphones. Je me rappelle que mes parents, le soir lorsqu’ils sortaient, posaient le combiné à côté pour que nous ne soyons pas réveillées en leur absence par des appels intempestifs.

Mais une nuit, à leur retour, ils ne parviennent pas à ouvrir la porte !

Dans un excès de précaution, j’ai vérifié avant d’aller me coucher que le verrou est bien fermé, j’ai certainement déplacé la position de la molette si bien qu’ils ne peuvent introduire la clé dans la serrure.

Ils ont beau sonner, tambouriner… aucun succès. Toutes les trois dormons profondément, et le bébé tout autant. Ils leur faut aller demander à mes grands-parents de les héberger pour le restant de la nuit.

Et les voilà qui reviennent le lendemain, dimanche matin, alors que, bel et bien réveillées, nous n’avons même pas perçu leur absence.

Le week-end, nous sommes habituées à les laisser faire la grasse matinée. Ces années-là, c’est même mon rôle de donner leur petit-déjeuner à mes sœurs et son biberon au bébé, puis de veiller à ce que nous soyons habillées et coiffées, chambres rangées, tout cela sans faire de bruit pour laisser dormir nos parents. Je me sens investie de cette mission, importante s’il en est, j’irai même jusqu’à dire que correspondre à leurs attentes fait partie de mes préoccupations et angoisses existentielles. Et l’on retombe dans des considérations d’amour conditionnel ou inconditionnel, mais c’est une autre histoire, toute mon histoire en fait.

Quelle n’est pas notre stupéfaction quand nous entendons sonner puis frapper à la porte à petits coups sonores. Aussi discrètement que possible – on ne hurle pas dans la cage d’escalier pour ne pas déranger les voisins – ils chuchotent : « Les filles, c’est nous ! Laure, ouvre-nous, voyons ! C’est nous ! »

Nous reconnaissons leur voix, sans l’ombre d’un doute. Mais, dûment chapitrée que je suis de ne jamais-jamais au grand jamais ouvrir à qui que ce soit quand ils ne sont pas là, en tant qu’aînée responsable de mes petites soeurs – hyper-responsabilisée, même – je conserve sur le moment une once de méfiance.

Vraiment j’hésite… Est-ce bête ? Devant la porte verrouillée, j’hésite. Indécise un jour, indécise toujours.

Puis je souffle à Guillemette d’aller jeter un coup d’oeil dans leur chambre. Elle revient aussitôt me rendre compte de la situation : « Eh ben ils sont pas dans leur lit ! »

Alors seulement j’ouvre la porte à nos parents, par chance hilares.

Ce matin-là ils sont d’une humeur exquise et le contretemps les a davantage amusés qu’irrités. Et moi, émoi, je m’en tire cette fois-ci à très bon compte.

J’avais complètement oublié cette anecdote familiale, c’est ce panneau humoristique qui m’y a fait penser. Mais mon histoire, du moins celle-là, c’est dans les early seventies qu’elle s’est produite.

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