Nuances de taille

Nuances de taille

Ce petit bout d’écrit, j’ai bien failli l’intituler « Bonne pour la casse d’imprimerie » – haha ! Mais maintenant que j’ai trouvé la justification de cette particularité que je vous expose ci-après, me voilà rassérénée. Je réitère donc mes excuses à celles et ceux que j’ai pu par le passé irriter voire insupporter… certainement je recommencerai !

——

Je n’ai guère envie de finir flagellée en place publique puis pendue haut et court ou que sais-je encore d’atroce dans ce genre-là ou même pire – jetée, peut-être – parce que j’aurai déplu ou une fois de trop émis une remarque déplacée, souvent trop bien placée d’ailleurs, sur la façon dont les choses s’écrivent ou se libellent puisque aussi bien l’un ou l’autre se dit ou se disent.

Est-ce ce côté grammarsorcière qui exaspère ? J’en connais plus d’une qui ainsi risquèrent d’être vives brûlées pour moins que cela par de plus énervés qui, ne les ayant pas crues, les voulurent cuites.

Mais j’ai pour ma part des excuses, des excuses de taille, à déposer à vos pieds ulcérés.

Je souffre, voyez-vous, d’une pénible somme de névroses obsessionnelles que l’on pourrait nommer compulsions grammaticale ou orthographique, ponctuationnaire voire typographique pour couvrir l’étendue du syndrome, dont le symptôme principal, peut-être le plus gênant, se traduit par une senteur particulière, entêtante peut-être, émanant de ma très modeste personne, une sorte de fragrance ambrée ou musquée, possiblement sucrée, susceptible à coup sûr d’indisposer mon entourage puisque beaucoup, oh oui, beaucoup me trouvent… puante !

Et pourtant, ah pourtant, si vous saviez. À une hygiène des plus rigoureuses je m’astreins.
Corporelle aussi bien que psychique.

Je tourne en général sept fois mon doigt autour de mon clavier avant de presser cet endroit fatidique qui précipite l’envoi du commentaire.

Ni fait ni à faire ?
Jamais je ne l’exprime. Je me retiens, ah ça, je me retiens.
Mais rien n’y fait.

Cet irrépressible besoin de relever l’erreur trébuchante, de redresser une tournure tordue, d’insérer serré un tiret d’incise, d’introduire une espace manquante, de glisser ici ou là des virgules pour donner de l’allant et faire varier le rythme, ou même de rectifier, disons-le tout cru, une faute criante, ce défaut – affreux, j’en conviens – me rend odieuse à certains.

Oh, je l’ai bien noté, allez.
On se récrie : mais oui, bien sûr, réécris, ajoute, retranche, fais à ton idée, je te suis.

Hélas, tous, même les plus patients, finissent par se lasser de cette bizarrerie qui n’emporte venant de moi, je vous l’assure, nul jugement désobligeant, nulle estimation dégradante.

Il faut donc qu’ici je m’explique. Mon métier entretient cette maladie qui, si elle n’est honteuse, n’en est pas moins contrariante.

Je suis correctrice, sans fouet ni bottes et totalement, mais alors là, totalement hors contexte bdsm, raison pour laquelle de très loin je préfère l’appellation relectrice.

Je ne corrige pas, j’optimise.
Nuance…
Elle est ici de taille.
De caractère.

——

J’ai bien évidemment écrit le texte qui précède sur un ton humoristicaustique, celui qu’entre tous je préfère. Il n’en reste pas moins que ce que j’affirme est parfaitement exact.

Par ailleurs, me trouvant très directement concernée par la question, j’ai découvert un fait des plus intéressants. Figurez-vous qu’il existe un TOC, trouble obsessionnel compulsif, que l’on appelle syndrome de pédanterie grammaticale (SPG). Pour ma part je récuse le terme pédanterie qui me semble péjoratif, mais les Américains qui ont nommé ce syndrome ne m’ont pas consultée.

C’est on ne peut plus sérieux ! Les personnes que ce syndrome affecte ne peuvent s’empêcher de rectifier les erreurs qu’elles voient ou entendent passer, ce qui les rend imbuvables pour certains… qui les vomissent. Je rappellerai à ce propos que tout dépend de la façon dont on s’y prend et de la faculté qu’ont les autres à se remettre en question – ce qui n’est pas gagné, vaste sujet.

Mais, fait notable que je porte à votre attention soutenue, c’est une variante du gène FOXP2 ayant un rôle important dans le langage qui explique ce besoin irrépressible de signaler une erreur décelée pour qu’elle soit corrigée (Source : https://blogs.illinois.edu/view/25/76120). Et je n’hésiterai pas à ajouter de mon propre fait que cela va de pair, me semble-t-il, avec la recherche de cohérence et de congruence.

Ainsi j’assume que l’on puisse me trouver puante et pédante car je sais que je suis tout simplement… une mutante !

📷 Pixabay

3 réflexions sur “Nuances de taille

  1. Je dois, très chère Laure, reconnaître que je me crois affecté par cette même singularité comportementale qui se caractérise par une propension à sursauter et remonter promptement le filet dans lequel mon attention et mes connaissances retiennent certaines des maladresses syntaxique ou sémantique qu’ils détectent et croient utile d’extraire du milieu symbiotiques du langage.
    Faut-il s’en réjouir ou, au contraire, s’en désoler, je n’ai toujours pas arbitré ce dilemme.
    Mais ce qui certain pour moi, c’est qu’il ne m’est jamais arrivé de m’offusquer du signalement de la moindre des rectifications justifiées qui m’ait été adressé pour la raison qu’il m’est toujours profitable de comprendre une erreur plutôt que de persister dans l’illusion de la justesse.
    Quant aux fragrances, répulsives ou bienfaisantes, c’est, par dessus tout, affaire de goût.
    Affectueusement tenu

    J’aime

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